« El Mawâïd.kawn » (Rendez-vous dans l’univers), spectacle postmoderne qui aborde la thématique de l’ « attente » dans sa dimension philosophique, est entré, mercredi à Alger, en compétition du 15e Festival national du théâtre professionnel (FNTP), devant un public conquis.
Accueilli au Théâtre national Mahieddine-Bachtarzi (TNA), lieu de déroulement du festival, jusqu’au premier janvier 2023, le spectacle est un bel hommage à l’intelligence dans la pratique du 4e Art, brillamment conçu par Mohamed Dine El Hennani, sur un texte de Sid Ahmed Grazib et un traitement dramatique de Abbassia Medouni.
D’une durée de 65 mn, la thématique de l’attente a été abordée à travers l’histoire d’un couple de comédiens en répétition d’une pièce de théâtre qui raconte les tourments de deux aliénés, qui, chacun de son côté, avait hâte de vivre une rencontre intense qui changerait sa vie, dans un spectacle, aux contours existentiels, rendu en quatre tableaux, déroulés en un seul acte.
Théâtre dans le théâtre, le couple de comédiens, incarné par Hichem Boussehla et Souad Djennati a été soutenu par Ahmed Sahli et Amine Bouterfas (fous, 3 et 4), qui leur ont servi de doublures, reprenant dans le mouvement, leur excitation et reproduisant leurs élucubrations, dans une sorte de miroir suggéré, rendu dans une symétrie spatiale quasi-parfaite.
Par moment cette disposition géométrique est délibérément brisée pour donner au duo de doublures les rôles de deux autres aliénés en attente de croiser leurs vécus respectifs, avec ceux d'autres personnes qu'ils pourraient rencontrer.
L’attente comme une porte qui s’ouvre sur les ambitions les plus folles, ou comme le début d’une nouvelle dynamique de vie, le spectacle a débuté par la scène de la pomme, d’Adhan et Eve, suggérant l’intensité d’une telle relation comme fil conducteur de la quête éternelle de l’amour apaisé et du bien-être recherché.
Dans une forme comique qui a permis au public de se délecter et au-delà de la symbolique d’opposition, le spectacle a utilisé le noir et le blanc dans les costumes, non comme couleurs, mais comme valeurs dans la vie : le chagrin, la tristesse et le diable, source du mal pour le premier, la clarté, la pureté et la sincérité pour le second.
Dans un rythme d’échanges ascendant, la trame « a été traversée par le courant absurde, avant de revenir à celui du réalisme », ont précisé les universitaires présents au spectacle.
Soutenu par un éclairage judicieux, feutré ou vif, latéral ou profond, horizontal ou vertical, et une musique illustrant les différentes situations, œuvre de Abdelghani Mahmoudi, le spectacle a été présenté sur une scène complètement nue, par « souci d’économiser et de réduire au maximum ses dépenses. »
« El Mawâïd.kawn » a été monté dans « une logique mathématique », explique le metteur en scène qui, par ailleurs, est docteur en physique, tenant compte du « moindre détail, tant sur le plan du casting que celui de la direction d’acteurs ou encore celui concernant l’influence de plusieurs courants théâtraux dans mon travail », lesquels, a-t-il poursuivi constituent « une valeur ajoutée et une richesse académique en soi. »
Le public a longtemps applaudi le spectacle, considéré, de l’avis de tous, comme « le premier à faire l’unanimité du festival, réussissant à allier rationalité et esthétique. »
La pièce de théâtre, « El Mawâïd.kawn » a été produite par le Théâtre régional de Sidi Bel Abbès.
Ouvert le 23 décembre dernier, le 15e FNTP accueille treize spectacles en compétition programmés au TNA et une trentaine d’autres en off, dans les salles Ibn Khaldoun, Théâtre municipal d’Alger-Centre et Hadj-Omar au TNA.
Par ailleurs, des conférences, des ventes de livres en présence de leurs auteurs, des masters-class et des spectacles de rue, sont également au programme du festival.