« Nous arrivons à la fin de l’année sans visibilité en ce qui concerne le programme de réalisation des 15 mille mégawatts », interpelle, ce mercredi matin, Boukhalfa Yaïci, directeur général du Cluster énergie solaire dans l’Invité de la rédaction de la Chaine 3 de la Radio Algérienne. « Les annonces ne sont pas suivies de décisions sur le terrain », relève ce professionnel du secteur, qui en appelle à l’intervention des plus hautes autorités de l’Etat.
Les investisseurs s’inquiètent du retard dans la réalisation du programme national de développement des énergies renouvelables. « Les objectifs fixés dans les plans d’action du gouvernement en 2020 et 2021 ne sont pas tenus, ce qui fait que nous arrivons à la fin de l’année sans visibilité en ce qui concerne le programme de réalisation des 15 mille mégawatts or, la situation reste critique sur le plan de la satisfaction des exportations et du marché national donc, il va y avoir, à un moment donné des arbitrages qui vont se faire au profit de la consommation nationale, alors que l’enjeu se situe aussi au niveau des exportations, d’où la nécessité de travailler sur le remplacement d’une partie de la consommation nationale en ayant recours aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique », résume le directeur général du Cluster énergie solaire.
« On constate que ce dossier n’est pas uniquement du ressort du ministère de la Transition énergétique et des Energies renouvelables, il y a d’autres parties prenantes comme le ministère des Finances et le ministère de l’Energie », relève Boukhalfa Yaïci. Selon lui, le dossier est bloqué au niveau du financement : « les conditions du financement pour que les investisseurs puissent participer ne sont pas encore en place et c’est ce qui fait que les pouvoirs publics, notamment le ministère de la Transition énergétique, n’a pas encore lancé son appel d’offres ».
Boukhalfa Yaïci : « on constate une dérive dans la gestion de la transition énergétique dans notre pays »
L’expert évoque un retour en arrière et une perte de confiance des investisseurs. « Il y a une quarantaine d’années, l’Algérie était pionnière dans le domaine des énergies renouvelables, je me souviens de la piste Reggane-Borj Badji Mokhtar électrifiée à l’énergie solaire. Nous constatons un retournement de situation ».
« Les investisseurs ont fait confiance à l’Etat et ont réalisé les investissements nécessaires dans le cadre des panneaux photovoltaïques, mais le marché n’est pas là et les usines ne tournent pas. Pire que ça, on constate un afflux important de produits qui viennent de la zone arabe de libre échange, parce qu’ils bénéficient des exonérations, et d’autres pays encore plus loin que ça », témoigne le directeur général du Cluster énergie solaire, qui estime que « l’on fait comme si on voulait faire travailler les étrangers chez eux mais pas les algériens ici ».
Boukhalfa Yaïci craint que les investissements algériens deviennent obsolètes à cause du retard cumulé
Selon lui, ce marché, en termes d’investissements réalisés, est estimé « autour de 50 millions de dollars avec un millier d’emplois directs dans le photovoltaïque, mais aussi, l’ensemble des entreprises qui interviennent dans la réalisation de ces installations ». Il constate « un engouement important face à un marché très limité ».
Autre risque soulevé par Boukhalfa Yaïci, celui d’être dépassé par la technologie. « Depuis deux ou trois ans, il y a une sorte de saut au niveau de la technique des panneaux solaires photovoltaïque qui va rendre obsolètes ces investissements. Les investisseurs aujourd’hui ne sont pas en mesure de mettre à niveau leurs usines parce que, déjà, les premiers investissements n’ont pas encore été rentabilisés », interpelle encore le directeur général du Cluster énergie solaire.