Abdelkrim Chalghoum plaide pour « une cartographie multirisque » en Algérie

13/08/2024 - 11:54

Comment appréhender la recrudescence des incendies des forêts qui augmentent, en nombre et en espace, crescendo avec le réchauffement climatique ? Une question lancinante à laquelle le président du Club algérien des risques majeurs, Abdelkrim Chalghoum, tente ce mardi d’apporter des éléments de réponse. Et de suggérer au premier plan l’impératif de revoir toute la loi de gestion des crises majeures.

Intervenant à l’émission « L’Invité de la rédaction » de la chaine 3, de la Radio Algérienne, M. Chalghoum considère d’emblée que « les feux de forêts sont un sous risque par rapport aux risques majeurs comme les inondations, les séismes, la sécheresse et la désertification qui secouent pleinement l’Algérie. Pourtant, ces incendies font depuis 1998, perdre à l’Algérie, chaque été, une moyenne de 30 000 à 40 000 hectares d’espaces verts ». Et de rappeler, dans une courte rétrospective que ces ravages par les feux de forêt ont occasionné des pertes humaines, de cheptels et touché pleinement à l’agriculture.

Une situation gravissime

Cette situation va de mal en pis et relève, selon lui, en l’absence d’une prévention adéquate et fiable basée sur une cartographie des zones à risque d’incendies.

« Il y a des années que ce pic s’amplifie jusqu’à atteindre, en 2021, les 90 000 ha ravagés par les feux de forêts à Mila, à Blida, à Jijel, à Khenchela et à El Tarf auxquels doit-on ajouter les 25 000 ha, partis en fumée en Kabylie », rappelle l’intervenant.

Le constat, fait-il savoir, est que d’année en année on s’aperçoit que le problème ne se règle pas, en dépit du fait que la prévention est cadrée par la loi 04/20 (depuis 20 ans plus tôt-ndlr) où tout est spécifié, tout est mesuré aux moindres détails basiques, que ce soit les dispositifs réglementaires ou les mesures techniques qui vont avec. « Des mesures qui réduisent à 80% le risque si elles étaient appliquées », assure-t-il.

Le spécialiste revendique avec insistance « une cartographie multirisque » des zones à risque, échelonnée par degrés de dangerosité, qui est un outil indispensable et efficace pour la lutte contre les incendies, regrettant jusqu’alors la négligence sur cet aspect.

« Il faut une réflexion sur la réorganisation de toutes les institutions concernées par la gestion et la prévention des risques majeurs », insiste-t-il, expliquant que « la segmentation de cette organisation est limpide et est très détaillée, mais tardant à venir ».

Il faut un organisme de gestion et de prévention des crises

« Maintenant la situation a atteint un seuil tel qu’il est devenu insupportable pour l’Algérie », déplore M. Chalghoum.

L’initiateur de l’idée de « la cellule de crise », en 2004, alerte « qu’il est grand temps que le prochain mandataire (président élu-ndlr) s’intéresse de près à la gestion et la prévention des risques majeurs et la mise en place d’un Organisme national de gestion des crises.  

Faut-il une université ou une école supérieure des risques majeurs ? L’orateur rappelle qu’il a déjà proposé des masters ou des magisters en sciences des catastrophes avec un programme bien ficelé, en collaboration avec des universités étrangères spécialisées, mais malheureusement, regrette-t-il, cela est resté lettres mortes.

Ce dispositif permettra d’avoir les ressources humaine comme les secouristes de catastrophes, le médecin de catastrophe, les sapeurs-pompiers qu’il faut, les ingénieurs de catastrophes et le journaliste de catastrophes qui doit gérer l’information sans provoquer la panique générale.

L’exemple Californien

Etant riche en verdure et l’épicentre des incendies, la Californie, une zone à risque aux USA, s’impose, dit-il « « en modèle aux Algériens pour s’y inspirer. Ils ont de l’expérience dans la lutte des incendies ».

Pour prévenir les incendies, les Californiens ont aménagé des dispositifs préventifs exemplaires comme des tranchés pare-feu, des pistes anti-feux, des campagnes de débroussaillage devant chez soi où le citoyen est étroitement impliqué pour sa propre sécurité.

« La sensibilisation des citoyens est une obligation majeure, surtout que nous avons des massifs verts habités contrairement à la Californie », avise-t-il, et où il est interdit de construire des habitations dans les zones forestières, toutefois ils y circulent à l’aise sur de larges pistes en caillasses avec des espaces aménagés de points d’eau.

« Le citoyen est bien impliqué dans le processus de prévention qui ne coûte pratiquement rien », indique-t-il.

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