Le fondateur du Conseil mondial de la diaspora algérienne (CMDA), Karim Zéribi, a réagi, ce lundi sur les ondes de la Radio algérienne, à l’éviction de Bruno Retailleau et à l’arrivée de Laurent Nuñez à la tête du ministère de l’Intérieur en France, affirmant que c’est un tournant majeur dans les relations entre la France et l’Algérie.
Intervenant à l’émission « l’Invité du jour » de la chaîne 3, Zéribi a indiqué que Bruno Retailleau a largement contribué « à dégrader les relations entre la France et l’Algérie. Son attitude, jugée hostile et idéologique, aurait placé l’Algérie dans une posture d’ennemi, ce qui est une erreur fondamentale, surtout avec un payas comme l’Algérie ».
« Retailleau a volontairement tendu les relations. Il a politisé les dossiers migratoires et bloqué de nombreuses coopérations, notamment économiques. C’est incompréhensible », a déploré Zéribi, soulignant qu’à peine nommé, « Laurent Nuñez a donné un nouveau ton. Il veut une relation normale avec l’Algérie. Il ne cherche pas à l’instrumentaliser politiquement. C’est un pas dans la bonne direction. »
Une diplomatie plus constructive
Selon Zéribi, « Laurent Nuñez, ancien chef des renseignements français, connaît bien l’Algérie. Il l’a affirmé clairement. Il ne souhaite pas jeter de l’huile sur le feu. Il veut avancer sur une base de respect mutuel. Et, surtout, il a été clair sur un sujet sensible, l’accord franco-algérien de 1968 sur la circulation, le séjour et l’emploi des ressortissants algériens », précisant que « sa remise en cause (accord franco-algérien de 1968-ndlr) n’est pas à l’ordre du jour », saluant cette position responsable.
Il rappelle que cet accord a déjà été révisé à trois reprises. Pourtant, certains rapports parlementaires, très politisés selon lui, en dénoncent le coût, estimé à près de 2 milliards d’euros par an pour la France, soulignant que « ce qu’on ne dit jamais, c’est ce que les Algériens rapportent à l’économie française. On parle toujours de ce que l’immigration coûte, jamais de ce qu’elle apporte. »
Aussi, Zéribi a dénoncé une certaine hypocrisie dans les discours politiques. « C’est comme l’aide au développement. L’Algérie ne bénéficie d’aucune aide directe. Ce budget sert surtout à financer les institutions françaises installées en Algérie. Il y a beaucoup de malentendus, et surtout beaucoup de mauvaise foi. »
Des conséquences concrètes
Zéribi rappelle que « la dégradation des relations a eu un impact à tous les niveaux ». Sur le plan économique, il souligne que « les exportations de blé à destination de l’Algérie représentent près d’un milliard d’euros par an. Il évoque également les 450 entreprises françaises installées en Algérie, la coopération sécuritaire et les enjeux migratoires ».
« C’est scandaleux d’avoir sanctionné les Algériens qui travaillent en France. Retailleau les a harcelés inutilement. Ce sont eux qui font tourner cette économie. »
Macron affaibli, l’extrême droite en embuscade
Karim Zéribi analyse également le silence d’Emmanuel Macron face aux débordements de Retailleau. « Le président est affaibli. Il n’a plus de majorité au Parlement. Ses dix ans au pouvoir sont marqués par une économie en difficulté et une société divisée. Il n’a pas su imposer une relation apaisée avec l’Algérie », rappelant que plus de cinq millions de personnes d’origine algérienne vivent en France et contribuent pleinement à la société.
Dans ce sens, il dira que « dans tous les services publics, des milliers d’Algériens et des milliers de Français d’origine algérienne sont présents. Et cela dérangeait visiblement Retailleau. »
Faire face à l’histoire, reconnaître les liens humains
Zéribi insiste également sur la nécessité de regarder l’histoire en face. Il cite les commémorations du 17 octobre 1961, saluant les gestes symboliques comme celui de l’ambassadrice de France en Algérie qui s’est recueilli en France.
« Les Français d’aujourd’hui ne doivent pas porter seuls le fardeau de l’histoire. Mais il faut la reconnaître, la regarder en face. Cela fait partie de l’apaisement. »
Nuñez : une opportunité pour relancer la diplomatie
Pour Karim Zéribi, « Laurent Nuñez représente une réelle chance pour tourner la page. Il ne cherche pas à instrumentaliser la relation franco-algérienne et adopte une posture bien plus constructive que son prédécesseur », ajoutant qu’« avec Nuñez, tout est possible. La diplomatie, ce n’est pas la vengeance ou le mépris. C’est le dialogue et la reconnaissance des intérêts communs. »
Enfin, Zéribi conclut sur une note politique en fustigeant encore une fois le prédécesseur de Nuñez : « le comportement de Retailleau a été inacceptable. Ce n’est pas un candidat sérieux pour la présidentielle. La France mérite mieux. »
Farid B-Radio Algérie Multimédia